Les éditions communistes, Kezako ???




        Création du PCF et débuts de l’édition comme outil de propagande.


A la création du PCF en 1920, lors du Congrès de Tours, la presse et le livre se révèlent rapidement comme des outils indispensables à la formation des militants et à la propagande communiste au sein de la population. D’ailleurs dès les débuts du Parti communiste, la librairie de l’Humanité est créée, et en 1927, le bureau d’édition, de diffusion et de publicité. Cet organisme est chargé d’éditer des brochures et des textes de vulgarisation politique.
Les éditions sociales internationales sont crées en 1927, elles sont « la maison d’édition du Komintern en France ».
L’appareil éditorial du PCF à l'époque du Front populaire était constitué du Bureau d’éditions, dirigé par R. Hilsum, des Editions sociales internationales, dirigées par L. Moussinac, et du Comité populaire de propagande.

                        Les maisons d’édition du PCF engagées dans la Résistance.

Pendant la Drôle de guerre, les maisons d’édition du PCF, ses librairies et le CDLP sont fermés et les stocks saisis par le gouvernement. Pendant un an, aucun document ne sera publié. Dès lors le PCF entré dans la clandestinité doit réorganiser sa propagande. C’est l’époque de l’édition de textes ronéotypés.

En 1941, le PCF crée en zone Nord les éditions « Hier et aujourd’hui ». Cette maison d’édition est destinée à accueillir des textes plus ou moins littéraires visant l’ensemble de la population et pas seulement des militants.

Parallèlement se créent en 1942 les éditions de Minuit, maison d’édition de la Résistance qui se donne pour objectif de soutenir la création.

Le PCF s’engage alors dans le soutien à la création du Comité national des écrivains.
 En zone sud, en juin 1943 est créée la « Bibliothèque française » sous la responsabilité de Louis Aragon, maison d’édition du Comité national des Ecrivains.

Ces deux maisons d’édition ne pourront pas concurrencer les éditions de Minuit mais la priorité du PCF est plus de former des militants et de convaincre la population que de s’adresser aux intellectuels.
Cependant à partir de 1944, le PCF confie aux Editions sociales – anciennes éditions sociales internationales –, la tâche de former idéologiquement les militants, tandis que les éditions d’Hier et aujourd’hui sont chargées de reconstituer le fonds romanesque d’avant guerre et que la Bibliothèque française, dirigée par Aragon, s’oriente vers la défense d’un réalisme français avec la publication de textes sur la Résistance et de livres d’artistes.
Jusqu’en 1947, les maisons d’édition du PCF connaissent un essor considérable, 90 titres sont publiés annuellement avec un tirage moyen de 15 700 exemplaires. Mais les effets cumulés du contexte politique moins favorable, l'entrée dans la Guerre froide et la crise économique conjuguées à une crise de l’édition obligent le PCF à redéfinir sa stratégie éditoriale.

                        Après la Libération et pendant la Guerre d’Algérie.

La stratégie éditoriale du PCF change avec la fin de la guerre. Le parti a désormais l'intention d'intensifier la propagande en publiant d'une part des textes politiques : cette tâche sera confiée aux nouvelles « Editions sociales » fondées à la suite des Editions sociales internationales en 1944. D'autre part la publication de textes littéraires sera assurée par la nouvelle maison d'édition, les "Editeurs français réunis", née de la fusion des éditions d'Hier et Aujourd'hui et de la bibliothèque française, en 1949.
Aragon, en sera le directeur littéraire jusqu’en 1954. Cette maison d’édition a désormais pour tâche de diffuser le réalisme socialiste, français ou étranger et particulièrement soviétique et d’éditer les textes d'actualité politique. Mais cette réorganisation ne permet pas la diffusion hors du cadre militant.

Même si le parti fait plus preuve d'indifférence que d'intérêt pour les publications de ses différentes maisons d'édition, il nomme néanmoins au sein du Secrétariat du PCF, un membre chargé de suivre l'activité éditoriale française communiste et non communiste, membre qui peut par ailleurs exercer un droit de censure sur les publications à destination du parti[1]. André Marty, puis Etienne Fajon, occupèrent successivement ce poste après la Libération.
La différence principale entre les maisons d'édition du PCF et les autres maisons d'édition privées dites « bourgeoises », est que le PCF contrôlait l'ensemble des aspects, de la politique éditoriale jusqu'au contrôle financier.
Las de ce contrôle politique incessant niant tout esprit de création, Aragon se retire de la direction des EFR en 1954, et deviendra deux ans plus tard responsable de la nouvelle collection « littératures soviétiques » chez Gallimard en 1956. Cet acte marque la fin de la présence du PCF dans le domaine de l’édition littéraire.

Cette ingérence vécue avec difficulté notamment par Aragon au sein des Editeurs français réunis sera moins problématique pour les Editions sociales qui sont clairement sous la direction du comité central et qui sont chargés de reconstituer les archives marxistes-léninistes disparues avec la guerre.

En 1950, le PCF participe également à la création du "Cercle d'art", cette maison d'édition a pour objectif de diffuser les œuvres d'artistes proches du mouvement communiste. Ainsi des artistes comme Pablo Picasso privilégieront cet éditeur à l'instar de Paul Eluard, René Char, Henri Michaux...

Les éditeurs français réunis, les éditions sociales, la Farandole et le Cercle d’art sont représentées au SNE. Elles disposent d’un outil de diffusion remarquable qui est le CDLP qui compte 230 employés en 1950 et ses « bibliothèques de bataille du livre », un millier à leur apogée en 1952.


         Les années 60 et 70, à la croisée des chemins

Le PCF s’oriente à cette époque vers  la mise en place d’un réseau de librairie de la Renaissance, dont la 51ème boutique est ouverte à Nîmes en 1973 et la constitution d’un groupe éditorial : Messidor – Editions sociales qui figurera au septième rang dans les classements nationaux en 1970.
Parallèlement cette période est marquée par la radicalisation du champ éditorial et la montée en puissance des Editions de Minuit sous la direction de Jérôme Lindon et des éditions de François Maspero[2]. Cependant en ce qui concerne la guerre d’Algérie, le PCF se place en retrait et laisse le champ libre à Maspero et aux Editions de Minuit. Ainsi La question d’Henri Alleg, pourtant dirigeant clandestin du parti communiste algérien, ne sera pas publié par le PCF mais par Minuit[3].
Réseau très décentralisé des librairies La renaissance – 51 boutiques en 1973. Le PCF après 1968 conservait ses forces principales de diffusion du livre en province. CF importance de la librairie « La joie de lire » des éditions Maspero.

                        Le déclin des années 80-90

Le groupe Messidor-Editions sociales alors 7ème éditeur français diffusé par la Sodis, s’écroule en 1992. La Dispute devient éditeur et diffuseur du fonds ancien des Editions sociales.
Par ailleurs le Temps des cerises détient et réédite une partie du fonds des éditions Messidor. 


[1]              Bouju Marie-Cécile, Etre éditeur et communiste pendant la guerre froide : le cas des maisons d’édition du Parti communiste français 1944-1956, Maison française d’Oxford Publishing and Politics in France and Great-Britain (in the aftermath of the Second World War), 10th November 2006.
[2]              Mollier Jean-Yves, Edition, presse et pouvoir en France au XXème siècle, Fayard, 2008, p.281.
[3]              Ibid, p277.